Pourquoi SUD éducation s’oppose aux nouveaux programmes
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Une méthode autoritaire, des contenus inadaptés et souvent trop denses, ces nouveaux programmes, inscrits dans le cadre des contre-réformes des rythmes scolaires, du collège et des statuts vont considérablement alourdir notre charge de travail.
Les nouveaux programmes du CP à la 3e ont été présentés au Conseil Supérieur de l’Éducation des 7 et 8 octobre. SUD éducation s’est clairement prononcé contre, comme expliqué dans sa déclaration lue en séance du 7 octobre. Nous avons par ailleurs vivement réagi aux conditions d’examen et de vote particulièrement scandaleuses de ces textes (cf. déclaration et lettre ouverte au directeur de cabinet de la ministre : www.sudeducation.org/Contre-les-nou...).
Il faut replacer la présentation de ces programmes dans le contexte des déclarations de la ministre qui sont autant de gages donnés aux partisans du conservatisme scolaire avec comme symbole le retour à « la dictée quotidienne ». On est bien là dans une instrumentalisation du discours sur l’école, car tout ceci n’apparaît aucunement dans les nouveaux programmes. Quant à l’autre « nouveauté » annoncée qu’est le calcul mental, il est déjà habituellement pratiquée par les collègues en élémentaire... Cela ne facilite pas la lisibilité, pour les parents d’élèves et par la société, de ce qui est pratiqué à l’école, des débats réels qui la traversent, des enjeux des réformes actuelles. Cela va renforcer encore les pressions sur les enseignant-e-s à tous les niveaux.
L’ensemble des nouveaux programmes est désormais en cohérence avec la nouvelle version du socle dit « de connaissances, de compétences et de culture ». Celui-ci s’inscrit dans le cadre de la loi relative à l’orientation et à la formation tout au long de la vie, qui met en œuvre une école néolibérale que nous combattons. Cette loi instaure notamment un Passeport orientation et formation pour les travailleurs-euses, dispositif plébiscité par les milieux patronaux. À l’école primaire, la mise en œuvre des programmes de cycle 2 et 3 s’appuie sur les PEdT (Projets éducatifs territoriaux), dont les contenus sont soumis aux orientations et aux choix politiques de municipalité.
L’ampleur des programmes varie énormément selon les cycles et les disciplines. Leurs contenus sont très inégaux, pléthoriques pour certains, avec des répartitions horaires inadaptées. Rien dans les programmes ne permet d’améliorer les rythmes d’apprentissages des élèves. Ils maintiennent à une portion congrue les connaissances techniques et les pratiques manuelles ou artistiques.
Ils demandent aux équipes pédagogiques une prise en charge collective de la programmation annuelle de tous les enseignements et un travail inter-degrés notamment pour le cycle 3 (CM1, CM2, 6e) totalement déconnecté de la réalité du terrain actuel et des réalités propres à l’école et au collège, alors qu’aucune diminution du temps de service n’est prévue pour compenser cette charge de travail supplémentaire. Alors que ces programmes font la promotion du travail inter-disciplinaire en primaire et bien sûr en collège avec les EPI, celui-ci sera paradoxalement bien plus difficile entre l’histoire et le français en 6e, dont les programmes ne sont désormais plus liés. Enfin parce que le ministère a cédé à certains groupes de pression, la nouvelle version du programme d’histoire géographie est de nouveau trop lourde au collège.
Le calendrier et les modalités d’application de ces nouveaux programmes justifieraient à eux seuls notre opposition. Pour harmoniser leur mise en place avec celle du collège et avec les échéances politiques de 2017, pour la 1re fois tous les programmes vont changer dès 2016. Cela va se traduire par un accroissement énorme de la charge de travail des collègues, pour lesquels aucune formation n’est proposée en dehors du formatage qui s’annonce pour la mise place de la réforme du collège et de formations via m@gistère ou de ressources en ligne dans le 1er degré.
La mise en place des nouveaux programmes et leur fabrication relèvent d’une conception directive et autoritaire alors que ce gouvernement avait promis une démarche associant les enseignant-e-s. Le simulacre de consultation qui a été organisé a comprimé intensément les délais pour aborder les nombreuses problématiques soulevées en termes d’organisation du travail, d’égalité d’accès aux formations, et de contenu. Le Conseil Supérieur des Programmes (CSP), instance qui devait être indépendante dans l’élaboration des programmes, a finalement été repris en main au printemps par le ministère. Et trop souvent le ministère a choisi, comme en histoire géographie, de céder aux pressions politiques. On est bien loin des promesses de 2012 d’une fabrication des programmes dont les contenus et le calendrier devaient permettre l’intervention des collègues de terrain !
Par ailleurs, leurs prescriptions nécessitent des moyens colossaux (équipements sportifs et numériques, locaux, financement des projets artistiques), dont les écoles et les collèges ne disposent que très partiellement et avec une répartition très inégale sur l’ensemble du territoire. Avec la réduction des budgets que l’Etat alloue aux collectivités territoriales, cela ne va pas s’améliorer.
Comme préalable à tout nouveau programme, SUD éducation revendique :
- La réduction du nombre d’élèves par classe
- La création des postes de titulaires en nombre suffisant
- Des RASED complets avec départs en formation : restitution des 5 000 postes supprimés sous Sarkozy et développement de RASED complets partout en nombre suffisant
- Un recrutement massif de personnels médico-sociaux grâce notamment à des conditions attractives : infirmier-e-s, médecins scolaires, assistant-es sociaux
- Une véritable formation pour les AVS et pour les enseignants en ASH
- Du temps pour le travail en équipe
- L’accueil de tous les enfants et de leurs familles, obligation légale, en donnant aux parents non-francophones les moyens de comprendre l’école et ses objectifs par l’emploi d’interprètes
- La garantie de l’égalité de traitement pour tous les élèves sur tout le territoire.
- Ces nouveaux programmes, qui ont été construits sans les personnels, sont imposés aux personnels contre l’avis de leurs représentant-e-s syndicaux, par une méthode autoritaire qui ne rompt pas avec les pratiques précédentes.
- Ils restent sur le fond inadaptés et trop souvent inapplicables par leur densité. Trop souvent aussi, dans leur contenu comme dans les discours qui les accompagnent, le ministère a cédé aux pressions réactionnaires, pour aboutir à des incohérences et à des confusions dont les personnels vont encore faire les frais.
- Ils s’inscrivent dans le cadre des politiques libérales du gouvernement et des contre-réformes éducatives du ministère (Loi de refondation, Loi sur l’orientation et à la formation tout au long de vie, réforme des rythmes scolaires et territorialisation, réforme du collège).
- Leur mise en œuvre va aggraver les effets des contre-réformes des statuts, missions et services, et elle va alourdir encore la charge de travail des personnels.
Cette situation va encore s’aggraver avec les réformes de l’évaluation des élèves qui préfigurent une véritable usine à gaz.
SUD éducation revendique une tout autre méthode de construction des programmes associant réellement les personnels, avec des programmes inscrits dans un service public d’éducation égalitaire, dans la perspective d’une école, d’un collège et d’un lycée uniques proposant un enseignement polytechnique qui garantisse à tou-te-s les élèves l’exploration de tous les types de savoirs, qu’ils soient manuels, techniques, artistiques ou théoriques, reposant sur des pratiques pédagogiques coopératives et émancipatrices.
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